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La province Nord :Koné, plage de Franco, plage de pindaï
Plage de franco :
La route séparant Bourail de Koné est magique : alors que le soleil commence à se coucher, ses rayons caressent les hautes herbes blondes de la savane calédonienne qui prennent tantôt des couleurs dorées, tantôt des couleurs rousses. La route traverse un paysage vallonné, parsemé de forêts de niaoulis. Nous ne voyons aucune habitation sur notre route, seules quelques fermes dédiées à l’élevage bovin occupent cette partie de la brousse.
Nous décidons de poser le camping-car à la page de Franco pour la fin de notre journée. Cette plage est marquée comme « curiosité » sur la carte touristique, amis aucun de nos guides n’en parle. Nous sommes seuls dans le camping, et entourés de mangroves. L’eau est un peu trouble, on voit parfois des bancs de poissons remonter soudainement à la surface, sans pouvoir voir ce qu’il se passe vraiment dessous. Nous ne nous sentons pas vraiment rassurés de nous baigner et optons pour la balade dans la cocoteraie voisine. Cette plage doit son nom à Franco-car, la société du même nom y extrayait du chrome à partir des alluvions. Le lendemain au réveil, nous comprenons mieux ce qu’il se passe. L’eau et le ciel semblent se mêler ici. La mer est calme, presqu’un lac, et se transforme en un miroir parfait. Impossible de voir à travers. On a l’impression de voir un mirage, joli spectacle que nous offre mère nature pour accompagner notre petit-déjeuner. Voilà le temps de remonter dans notre véhicule et de rejoindre une ville un peu plus au Nord appelée Koné.
Koné : est la capitale administrative de la province Nord. Elle est au cœur des tensions entre les provinces quant au rééquilibrage économique, depuis qu’une société canadienne y prévoit d’implanter une usine pyro-métallurgique qui concurrencerait celle de la province sud principale productrice de nickel.
A l’entrée de la ville, nous empruntons une piste de terre ocre plutôt chaotique. Elle nous conduit à la maison Caujolle, du nom du géomètre qui la fit bâtir par des bagnards à son arrivée en Nouvelle-Calédonie en 1870. Cette maison de style colonial passa entre différentes mains jusqu’à être rachetée en 2001 par la province Nord pour en faire un centre culturel.
Dans le jardin de la propriété, nous découvrons les fameuses habitations kanakes traditionnelles : des cases faites de bois et de chaume.
Les cases ont généralement une forme de ruche. Leurs constructions nécessitent plusieurs semaines à plusieurs mois et demandent les efforts réunis de toute la tribu, notamment pour le choix, l’abattage, le transport et l’érection du tronc qui servira de poteau central à la case. Le montage des traverses qui relient le poteau central aux poteaux périphériques destinées à stabiliser l’ensemble peut alors débuter. Le tout est maintenu par des lianes. Vient l’étape de couvrir la case : la 1ère épaisseur est faite d’écorces de niaouli pour l’étanchéité, vient ensuite la pose de la paille. Le torchis est appliqué sur les murs à la main par les hommes tandis que les enfants peindront l’ensemble à la chaux dès que le mur est sec. L’installation de la flèche faîtière ornée de coquillages marque la fin de la construction. Une fois terminée, la case est régulièrement fumée de manière à éliminer les parasites.
Les cases sont placées sous la protection des ancêtres : les effigies de ces derniers sont ainsi sculptées dans les poteaux de maintien tandis que les chambranles de l’entrée représentent les ancêtres paternels et maternels de la chefferie. Le poteau central représente le clan. La case traditionnelle kanake fait donc le lien entre le passé et le présent, entre les ancêtres et les membres du clan. La porte est basse pour obliger tout visiteur à s’incliner en signe de respect dès son entrée.
La case du chef ou chefferie est souvent plus grande, située au bout d’une allée entourée de pins colonnaires ou de cocotiers. Parfois les membres du clan y sont convoqués à l’appel de la toutoute, une conque utilisée dans le Pacifique. A son retentissement, le rassemblement est impératif et la palabre commence.
Plage de Pindaï :
Nous choisissons une nouvelle plage pour passer notre fin de journées : la plage de Pindaï. Cette plage n’est pas donnée à tout le monde, elle se mérite. Pour l’atteindre, il faut emprunter les 8km de pistes de terre qui mènent à la côte. Après 5 jours de pluie non-stop, ça relève du défi : la boue collante enveloppe les roues du camping-car et des flaques énormes inondent la piste. Après 5km, un « lac » barre notre route. Le temps de réfléchir à la meilleure option, une voiture nous double et traverse l’étendue d’eau. Il y a environ 10cm d’eau, mais ça n’a pas l’air de glisser. Nous tentons donc à notre tour notre chance… ça passe !
Encore quelques centaines de mètres et nous voilà au bord d’une nouvelle plage bordée de cocotier. Très répandus dans tout le Pacifique, il évoque pour les touristes vacance et évasion. Dans la société traditionnelle Kanak, il représente la femme. Lors des offrandes, pendant les cérémonies coutumières, il est toujours placé en premier en contact avec le sol avec la canne à sucre et le tarot d’eau car ces plantes qui contiennent de l’eau et qui représentent la femme, donnent la vie. Il est toujours offert en cadeau de mariage accompagné d’un sapin qui symbolise l’homme. Pour que le cocotier donne beaucoup de fruit, on fera monter une petite fille sur l’arbre qui marchera sur les branches du cocotier (tradition toujours réalisée à Canala). Le cocotier tient une très grande place dans la société kanak : ses feuilles sont tressées pour confectionner nattes ou paniers, le lait de la coco et sa pulpe sont comestibles et la fibre de coco est utilisée pour confectionner de la corde qui servira à créer des filets dans les tribus du bord de mer.
Equipé d’une machette, nous partons à la cueillette du fameux fruit. On vient de s’apercevoir après coup que l’on n’a pas respecté les règles d’usage concernant les cocos. En effet, selon les traditions ancestrales, il est interdit de ramasser les fruits tombés à terre lors d’un passage de cyclone et attendre que le temps se calme pour les récupérer (jusque-là ça va). Il ne faut pas couper la coco en son milieu (oups, première bourde ! aussi c’est la première fois que l’on manie la machette, on a fait comme on pouvait), il faut bien l’éplucher (bon ça aussi on s’est raté) et mettre en tas les peaux (mouais !). Ne pas respecter ses règles entrainerait des sauterelles à se nourrir des feuilles et risquerait de nuire à la croissance de l’arbre. Ce sont les ancêtres qui ne vont pas être contents… quitte à attirer leur foudre, nous passons aux aveux, nous avons ramené trois cocos à Nouméa pour en faire profiter notre tribu : coco fraîche, soupe au lait de coco, gâteau coco… Etienne lassé de manger ce fruit m’a donné un nouveau surnom : tata coco !
Bien contents d’avoir réussi à récupérer un dessert, nous décidons de « faire la coutume » et de partager notre butin avec les voisins qui avaient déjà installé leur bivouac au bord de la plage. Notre coco était très bonne et nos voisins étaient bien contents d’avoir un peu de compagnie. Ce sont deux jeunes dont le travail est de passer la semaine sur cette plage pour capturer des chats sauvages afin d’en suivre leurs déplacements et de mieux comprendre leurs comportements. Ces animaux ont en effet envahis le territoire, ayant peu de prédateurs, ils représentent un danger pour le cagou, un oiseau endémique de la Nouvelle-Calédonie maintenant en voie de disparition. Sur cette plage, s’il y a quelque choses en voie d’instinction, ce n’est certainement pas le moustique ! Le ciel se couvre, nous avons peur de ne pas pouvoir retraverser le « lac » s’il pleut d’avantage. Nous décidons donc de repartir avant que les sauterelles de la malédiction des cocos s’y mettent aussi !
Nous prenons la sage décision de reprendre la route et nous dirigeons vers l’étape suivante : Farino et le parc des grandes fougères. Nous repassons par la roche percée, et ce coup-ci assistons à un magnifique coucher de soleil.
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